Nombre total de pages vues

mardi 15 mai 2007

166 - Les gueux et le noble

Détracteurs, détractrices,

Auriez-vous préféré que je sois lisse, plat, fade, gentil et mollement aimable avec vous tous, à la manière des mondains de la plume qui, curieusement et comme par hasard, trouvent toujours dignes d'intérêt les livres de ceux qu'ils ont en face d'eux ?

Auriez-vous préféré que je vous parle de la pluie et du beau temps littéraire en ces semblables termes que vous usez ordinairement, c'est-à-dire avec le bout de la plume, avec des précautions puériles et ennuyeuses ? Auriez-vous mieux aimé que je vous parle de mes dernières lectures, que je vous dise que tel ouvrage paru est intéressant, que tel autre est moins intéressant et que le monde littéraire va son train-train avec ses hauts et ses bas, le tout arrosé d'un inoffensif nuage de lait dans le propos ?

Le débat, vous le préférez au vitriol ou à l'eau de rose ?

J'ai déjà assassiné le "Bateau Ivre" de Monsieur Rimbaud en cette société si peu choisie. J'ai encore fustigé cet imbécile de Beaumarchais avec son "Figaro". J'ai également dénigré quelques éminents érudits détenteurs d'un savoir encyclopédique et hermétique. J'ai ridiculisé les poètes, encensé les bourgeois, fait l'éloge de la richesse, de ma particule, du vice et du crime. De ces charmants sacrilèges j'attendais quelques beaux duels, des salves de haute volée, de martiaux coups de plume, terribles, historiques.

Je n'ai récolté que des bêlements, des aboiements et des beuglements. Voire des cancans.

Mais rien qui ressemble encore à quelque chose de "littéraire". C'est que faire la basse-cour est chose aisée pour de communs volatiles dénués de panache, tandis qu'atteindre les nues est une bien plus difficile affaire. Entre la plume du dindon et celle de la noble créature de Léda, il y a tout un monde.

Que fais-je donc dans ce poulailler ? Continuez à caqueter tous sur mon compte. Je me réserve pour moi le chant final du cygne.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire