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jeudi 17 mai 2007

438 - L'autorité du chapeau

Il ne savait ni lire ni écrire, ajoutait de la gnôle à sa soupe, puait comme un diable, titubait comme un imbibé qu'il était, chiquait du mauvais tabac... Cela dit il portait le plus haut chapeau du village, aussi était-il respecté, jalousé, craint. Il avait pour lui de porter comme un chef son grand chapeau sur la tête... Homme devenu puissant, important depuis qu'il avait trouvé ce vieux haut-de-forme dans son grenier, le père Chaudot usait de son nouveau pouvoir sans retenue.

Il exigeait de sonner les cloches de l'église, de faire partie du cercle intime des notables, d'ouvrir la cérémonie du 14 juillet, de fermer les portes de la mairie, de seconder le premier adjoint, de serrer la main du garde-champêtre, de l'employée de mairie, et même du pharmacien !

Homme devenu respectable, en tout cas homme au chef dûment couvert de feutre et de prestige, ce qui était déjà beaucoup au village, le père Chaudot passait pour LA personnalité locale, jetant une ombre insolente sur la renommée du maire fraîchement élu. Ce dernier ne portait d'ailleurs qu'un plat béret.

Le maire peu à peu était descendu dans l'estime de ses administrés. Descente proportionnelle à la hauteur du chapeau de son rival. Bientôt ce fut le père Chaudot qui sembla faire la loi au village : c'est lui qu'on invitait à dîner, lui qu'on admirait, lui qu'on écoutait.

Six ans plus tard le père Chaudot, bien qu'il fût analphabète, incapable et passablement altéré par la gnôle, fut élu maire du village.

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